http://retirada37.com/lestaca-un-hymne-a-la-liberte/
L’Estaca, une chanson symbole de la lutte anti Franquiste, n’est ni plus ni moins qu’une métaphore, un code que le public décrypte évidemment rapidement et auquel il s’identifie. La chanson sonne clairement comme un chant de résistance au fascisme en même temps qu’un chant d’espoir et une invitation à ne jamais cesser de lutter contre le pouvoir autoritaire car le temps peut remplacer la force quand celle-ci fait défaut. Au bout d’un an, cette chanson est censurée par Franco et interdite. Une décision qui intervient trop tard tant les paroles et la mélodie qui l’accompagne sont connues de tous. A aucun moment Lluis Llach ne reculera devant la pression et les menaces. Pour ne pas se mettre en danger, il lui arrive de jouer les notes sans paroles et de laisser à son public la liberté d’entonner le texte. En 1970, Llach se produit ainsi au Théâtre espagnol de Madrid. Sa popularité naissante lui attire les foudres du pouvoir et tous les textes interprétés en public doivent préalablement être soumis à la censure. Au garde à vous devant son micro, il explique alors la situation pendant que son pianiste continue à jouer le refrain de l’Estaca. Trois mille personnes se mettent à chanter. Lui reste muet…
L’estaca (Le pieu)
Le grand-père Siset me parlait ainsi
Tôt le matin au portail
tandis qu’attendant le soleil,
nous regardions passer les charettes
Siset, ne voit tu pas le pieu
On nous sommes tous attachés,
Si nous ne nous détachons pas
Jamais nous ne pourrons nous libérer…
Si nous tirons tous il tombera
Et il ne peut plus tenir trés longtemps
Sûr qu’il tombera , tombera, tombera,
Bien vermoulu comme il doît être déjà.
Si je tire fort de mon côté,
Et que tu tires fort du tien,
Sûr qu’il tombera, tombera, tombera,
Et nous pourrons nous délivrer.
Mais, Siset, il y a longtemps déjà
que l’on s’ écorche les mains
Et quand la force m’abandonne
Il semble bien plus large et plus grand qu’avant.
Certainement qu’il est tout pourri,
Pourtant, Siset, il pèse tant!
Et parfois la force me manque.
Alors, chante moi encore ta chanson!
Si je tire fort de mon côté,
Et que tu tires fort du tien,
Sûr qu’il tombera, tombera, tombera,
Et nous pourrons nous délivrer.
On n’entend plus le vieux Siset
Un mauvais vent l’a emporté.
Qui sait où il est passé?
Et je reste seul au portail.
Et quand passent des jeunes,
Je tends le cou pour chanter
Le dernier chant de Siset
Le dernier qu’il m’ait appris.
Si je tire fort de mon côté,
Et que tu tires fort du tien,
Sûr qu’il tombera, tombera, tombera,
Et nous pourrons nous délivrer.
L’avi Siset em parlava
de bon matí al portal
mentre el sol esperàvem
i els carros vèiem passar.
Siset, que no veus l’estaca
on estem tots lligats?
Si no podem desfer-nos-en
mai no podrem caminar!
Si estirem tots, ella caurà
i molt de temps no pot durar,
segur que tomba, tomba, tomba
ben corcada deu ser ja.
Si jo l’estiro fort per aquí
i tu l’estires fort per allà,
segur que tomba, tomba, tomba,
i ens podrem alliberar.
Però, Siset, fa molt temps ja,
les mans se’m van escorxant,
i quan la força se me’n va
ella és més ampla i més gran.
Ben cert sé que està podrida
però és que, Siset, pesa tant,
que a cops la força m’oblida.
Torna’m a dir el teu cant:
L’avi Siset ja no diu res,
mal vent que se l’emportà,
ell qui sap cap a quin indret
i jo a sota el portal.
I mentre passen els nous vailets
estiro el coll per cantar
el darrer cant d’en Siset,
el darrer que em va ensenyar.