Suite à la plainte de la Ministre de l’Intérieur contre le collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes pour « injure publique » contre la Police aux Frontières : APPEL À SOLIDARITE ET À MOBILISATION !
Début juin, nous, collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes, avons appris que la police judiciaire recherchait les noms des « animateurs » du collectif dans le cadre d’une enquête préliminaire. Le collectif n’étant pas une association avec des « animateurs » mais un regroupement d’individus refusant la spécialisation des tâches et la personnalisation des actions menées, la police a demandé à la Maison Internationale de Rennes (MIR) de livrer des noms. La MIR, association indépendante qui héberge les assemblées générales du collectif, a refusé de se plier aux injonctions de la police, y compris lors d’une audition sur convocation. Cette pression sur la MIR a déjà été largement (élu-e-s, associations, etc.) dénoncée et notre collectif se joint à cette dénonciation publique.
Mercredi 18 juin, nous, membres du collectif, nous sommes collectivement présentés aux services de police judiciaire afin d’être informé-e-s sur l’objet de l’enquête nous concernant. Nous avons fini par apprendre, par voie de presse, que la ministre de l’intérieur portait plainte contre nous pour « injure publique contre un corps constitué de l’Etat », à savoir la Police aux Frontières (PAF). Suite aux premières auditions depuis le jeudi 19 juin, nous avons cru comprendre que 3 de nos tracts et 2 de nos affiches étaient plus particulièrement visés par l’enquête. Une bonne dizaine d’arguments utilisés et d’expressions employées ont été évoquées lors de ces auditions pour affirmer que nous aurions tenu des propos diffamants à l’encontre de la PAF. Nous tenons à disposition de quiconque les tracts et affiches visés par l’enquête afin que chacun-e puisse se faire une idée de ce qui nous est reproché.
Nous souhaitons en effet lancer un appel à solidarité et à mobilisation car nous pensons que, au-delà de la mise en cause du collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes, c’est une certaine forme de liberté d’expression et d’opinion qui est en jeu si cette plainte aboutit.
Depuis sa naissance en 2002, le collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes a été souvent sollicité par des personnes étrangères dénonçant les pratiques de la PAF, ce service particulier de la police chargé de lutter contre l’immigration dite irrégulière. Ainsi, à de multiples reprises, de manière médiatisée ou non, notre collectif a jugé important de dénoncer les modes d’arrestations d’étranger-e-s à domicile, les interpellations devant les écoles des parents sans-papiers, le menottage systématique des étranger-e-s interpellé-e-s, les arrestations d’étranger-e-s aux guichets des préfectures ou devant les locaux associatifs, l’irruption de policiers dans les procédures de mariages mixtes… Les tracts et les affiches visés par l’enquête
dénonçaient à nouveau ces pratiques, comme le font des centaines d’organisations et de collectifs sur tout le territoire français.
Mais, plus récemment et de manière croissante, le collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes a été sollicité par des personnes étrangères, de nationalités diverses, se déclarant victimes de contrôles d’identité fondés sur la couleur de peau ou sur la langue utilisée, en particulier dans les gares ou le métro. Ces contrôles ont aussi été rapportés par des témoins. Dans la quasi-totalité des cas, les personnes contrôlées sont considérées – dans notre société – comme des personnes « arabes » ou « noires ». Nous pensons notamment à 7 élèves d’un lycée rennais revenant d’une sortie scolaire qui, le même jour en mars 2008, ont subi ces contrôles que beaucoup nomment « au faciès ». Ces contrôles d’élèves – qui ont débouché sur une interpellation et une tentative préfectorale d’éloignement du territoire français – ont constitué une goutte d’eau de trop dans l’océan des contrôles d’identité qui nous semblent échapper à la logique d’un Etat de Droit.
C’est pourquoi notre collectif a décidé d’organiser, le 2 avril 2008, une nouvelle action de dénonciation publique des pratiques de la PAF. Cette action a été annoncée et rendue visible par les 3 tracts et les 2 affiches qui sont visés par l’enquête. Nous tenons à affirmer que ces tracts et affiches, conformément aux principes de fonctionnement de notre collectif, ont été élaborés et validés collectivement en assemblée générale. Le ton humoristique ou ironique et l’ambiguïté de certaines formulations, relativement habituels dans l’histoire de notre collectif, semblent être au cœur de la plainte dont nous faisons l’objet. Tout en réaffirmant avec force que notre collectif n’entend pas – comme toujours depuis 2002 – pointer du doigt les individus travaillant à la PAF mais les pratiques et l’existence même de ce « corps constitué de l’Etat », nous craignons que les formes de notre liberté d’expression et d’opinion contre les politiques d’immigration française soient le principal objet de la plainte du ministère de l’Intérieur. Et nous déplorons que ces formes de liberté soient davantage combattues, par le pouvoir actuel, que les effets de la « dérive sécuritaire » qui structure les pratiques policières, à l’encontre notamment des personnes considérées comme étrangères.
Afin d’empêcher cette plainte ministérielle d’aboutir, le collectif appelle à un :
RASSEMBLEMENT DE SOLIDARITE ET D’EXPLICATIONS
SAMEDI 28 JUIN A 15 HEURES, PLACE DE LA MAIRIE A RENNES
Collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes Assemblée générale ouverte à toutes et tous chaque mardi à 18 hs 30 à la MIR, 7 quai Chateaubriand Rennes
comité sans papiers juin 08
Le Collectif de soutien aux sans papiers dans le collimateur de l'Etat
Accusé d'« injure publique » envers la Police aux frontières, le Collectif de soutien aux sans-papiers a été reçu, jeudi, dans les locaux de la Police judiciaire de Rennes. En cause : trois tracts et deux affiches évoquant notamment les méthodes de contrôle d'identité de la PAF. Les membres du Collectif dénoncent une atteinte à la liberté d'expression.
Depuis quelques temps, les membres du Collectif rennais de soutien aux sans-papiers se savaient dans le collimateur de la police judiciaire. Lors de leur dernière action collective, mercredi 11 juin dans les locaux de la Ddass, ils avaient évoqué le sujet lors d'une assemblée générale. A la fin du mois de mai, la Mir (Maison internationale de Rennes), qui héberge le collectif, avait reçu la visite de la police judiciaire. Les agents demandaient à connaître l'identité des membres du Collectif. A la Mir, la police s'est vue opposer une fin de non recevoir. La directrice de la Maison internationale a ensuite été convoquée au commissariat, sans plus de résultat.
Plainte du ministère
Les membres du Collectif ont appris par la suite qu'ils étaient soupçonnés d' « injure publique à corps constitué de l'Etat. », en l'occurrence la police aux frontières. En cause : plusieurs tracts anonymes évoquant les méthodes d'interpellation des étrangers en situation irrégulière, qui évoquerait des contrôles d'identité racistes. Les propos sont remontés en haut lieu et le ministère de l'Intérieur a déposé une plainte auprès du procureur. Le Collectif de soutien aux sans-papiers est accusé d'être à l'origine du tract. La Police judiciaire refusant de leur donner plus d'explications par téléphone, et exigeant de connaître les noms des protagonistes, le Collectif s'est rendu au commissariat, mercredi dernier, afin de solliciter un entretien.
Tête-à-tête
Le tête-à-tête a eu lieu le lendemain. Deux membres du collectif, désignés en Assemblée générale, ont été reçus séparément à 9h et 17h. Ils ont appris qu'une dizaine d'arguments et expressions, employés dans des tracts et affiches du collectif, sont visés par la plainte. Selon un des membres, l'entretien aurait été moins cordial que prévu. Suite à ces « interrogatoires », le Collectif s'est réuni en assemblée générale, jeudi soir.
Liberté d'expression
Dans un communiqué publié peu de temps après, les membres dénoncent une atteinte à la liberté d'expression : « Le ton humoristique ou ironique et l'ambiguïté de certaines formulations, relativement habituels dans l'histoire de notre collectif, semblent être au coeur de la plainte dont nous faisons l'objet. Tout en réaffirmant avec force que notre collectif n'entend pas - comme toujours depuis 2002 - pointer du doigt les individus travaillant à la PAF mais les pratiques et l'existence même de ce « corps constitué de l'État », nous
craignons que les formes de notre liberté d'expression et d'opinion contre les politiques d'immigration française soient le principal objet de la plainte du Ministère de l'Intérieur. »
La police judiciaire n'a pas souhaité communiquer sur ce sujet. Les membres du collectif, quant à eux, appellent à un rassemblement de solidarité, samedi 28 juin à 15h, place de la mairie à Rennes.
Nicolas Legendre
http://sp35.free.fr/
Article transmis par un camarade.