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Action directe. Troisième texte de L'Inter 6. 82, du sommet de Versailles au Liban (1)

Un dernier texte est publié dans le dossier de L'Internationale No 6: Il est en fait une interview au Monde qui part de l'identité de l'organisation et des faits marquants de 1982, pour affirmer son rejet des attentats-massacres ayant eu lieu en France et de l'amalgame tenté par l'Etat et qui analyse deux faits essentiels: le sommet de Versailles et  la guerre au Liban (le texte est publié en deux parties sur le blog).

82, du sommet de Versailles au Liban


Action Directe n'est pas apparue par génération spontanée. Des individus ou des groupes ayant eu des expériences diverses de propagande armée ont ressenti la nécessité, au-delà d'actions ponctuelles ou de campagnes politiques (comme en 1997 après l'assassinat des camarades de la RAF, comme les campagnes sur le nucléaire ...), de se donner un instrument afin de promouvoir une stratégie communiste.

But et historique

Dès le début de notre apparition, nous avons été une guérilla communiste, défendant la lutte anti-impérialiste, sur une position de classe. La conséquence: une compréhension pratique de la nécessité de l'illégalisme révolutionnaire.
C'est le début de ce combat communiste qui a déterminé les instruments de lutte que nous avons créés. Nous pensons que ceux-ci peuvent amener une confrontation, un dépassement de l'expérience prolétaire, vers l'implantation d'une guerre révolutionnaire prolongée.
Nous ne pouvons faire ici un historique précis des actions entreprises par nos groupes. Nos objectifs délimitent clairement notre intervention politique.
Jamais nos actions n'ont pu prêter à confusion. Les moments et les cibles choisis apportent eux-mêmes la preuve de nos lignes fortes: guerre de classe et anti-impérialisme.
Nous avons lutté fort, et avons été réprimé fort.
Nous avons eu des camarades assassinés, nous avons connu des Q.H.S. dans le silence et l'arbitraire le plus total.
Pourtant, après quatre années d'existence, notre continuité politique n'a jamais été mise en danger. Nous posons toujours les mêmes questions.

Répression et amalgame

Nous n'avons jamais eu d'illusion sur le nouveau pouvoir, nouvelle gestion du Capital et tentative de réponse du système impérialiste en France.
Nous savons ce que signifie un gouvernement social-démocrate pour les prolétaires. En France, la répression de la grève des mineurs en 1948; dans les pays dépendants, les massacres de Sétif, le massacre de 80 000 personnes à Madagascar, les bombardements d'Hanoï, le coup de Suez ...
Mais nous avons essayé d'utiliser cette période d'euphorie et d'illusion pour tenter d'ouvrir de nouveaux fronts avec de nouvelles méthodes: lutte dans les prisons pour la fermeture des Q.H.S., lutte lors de l'manistie pour la libération des révolutionnaires emprisonnés, lutte avec les travailleurs immigrés pour le logement dans le quartier de la Goutte d'Or (occupation de six immeubles), travail d'information et de propagande écrite sur notre mouvement.
Face à nous, la force tranquille a dévoilé son vrai visage: provocation, diffamation, paternalisme, intimidations physiques, attentats contre nos squatts etc.
Plus de 1800 personnes ont été raflées en 4 mois, pressions sur les employeurs, tabassage de camarades, chantage sur la régularisation des papiers des camarades immigrés. Il a donc été difficile pour nous de sombrer dans "l'état de grâce".
Il était évident que les socialistes n'accepteraient aucune lutte ne s'intégrant pas à la contestation institutionnalisée et au soutien critique.
Le mois de juin 1982 a vu les enjeux de politicaillerie nationale dépassés par un événement déterminant: la venue de Reagan en Europe.
A l'ordre du jour dans les salons de Versailles:resserrer l'alliance impérialiste de l'O.T.A.N. à l'heure de la démocratie des droits du citoyen. Les marchandages qui portent sur les préparatifs d'une "guerre nucléaire tactique" en Europe, la fabrication de la bombe à neutrons française, le soutien ou non à des conflits dits " pérphériques", tel celui des Malvinas, sont soigneusement tenus secrets.
Reagan, en agitant le spectre de la guerre, a rencontré sur son passage un vaste mouvement de protestation dont l'ampleur ne s'était pas vue en Europe depuis une dizine d'années, mouvement majoritairement pacifiste qui, telle l'autruche, en se fermant les yeux et en invoquant la paix, croit pouvoir exorciser et retenir à sa porte un monstre informe déjà là. Dans le même temps se déclenchait l'invasion israélienne au Liban ...
Mais désormais la logique d'acier de la guerre impérialiste pénètre aussi les "pays développés", les métropoles.
La "crise", c'est-à-dire la restructuration du capital, cela veut dire des millions de chômeurs, des conditions de vie de plus en plus précaires. La menace brandie, c'est la répression sous toutes ses formes et c'est aussi l'anéantissement, le génocide séletif. Voilà la solution que propose Reagan.
Nous devons combattre les complots qui se trament. Ne pas nous limiter au catastrophisme, mais combattre. C'est dans ce combat que nous avons lancé une campagne limitée visant des objectifs américains et israéliens.
Nous sommes convaincus que des attentats-massacres tels que Marbeuf, Copernic ou la Rue des Rosiers, sont concertés et planifiés, de façon systématique, par des groupes de pression, et particulièrement les services secrets.
Des intentions politiques précises et des conflits inter-Etats se cachent derrière ces actes. Désamorcer toute opposition éventuelle, même d'autodéfense, devant la politique économique et militaire créée par les Etats, tel est le véritable but de ces attentats.
Bologne, Munich sont évidemment des faits d'Etats et non de guérilla. Il est affligeant que 13 ans après l'attentat de la Piazza Fontana, qui précède la tentative de coup d'Etat du prince Borghese, des gens marchent encore dans ce genre de panneaux.
Mêler comme le fait une certaine presse, les groupes de guérilla à ces actes, c'est leur donner le prolongement politique qu'attendent leurs instigateurs. Suffira-t-il de manipuler un déséquilibré qui mettra une bombe à 6 heures dans la gare Saint-Lazare, et de signer Action directe pour que l'on demande nos têtes?
L'après-midi de la Rue de Rosiers, alors qu'il était évident pour le gouvernement que nous n'étions, ni de près ni de loin, liés à ce massacre, Monsieur Deferre est intervenu personnellement pour faire arrêter tous les militants légaux d'A.D. Autrement dit, nous pensons que le gouvernement connaît virtuellement ceux qui ont téléguidé le massacre, mais qu'il est totalement impuissant.
Masquer cette impuissance en favorisant l'amalgame, c'est objectivement appeler au lynchage.
Les interminables discussions Est-Ouest pour savoir où et comment stocker les missiles nucléaires, les dialogues Nord-Sud arrachant aux pays dépendants leurs mains-d'oeuvre et leurs matières premières à bon prix, le diktat des multinationales de l'agro-business et des organismes de financement sur les pays affamés, les concertations patronales pour plus de rentabilité dans l'extraction de la force de travail, les décisions des Etats augmentant sans arrêt les effectifs et les moyens policiers, faisant à présent, comme en France, appel au contingent pour garantir la paix sociale.
Voilà une partie de la terreur quotidienne. A tel point qu'elle est banalisée et ressentie non plus comme violence mais seulement comme état de fait.
Par l'impact qu'ont les massacres sur les gens, en les amalgamant avec les guérillas métropolitaines, on cherche à provoquer un rejet qui, s'il aboutissait, conduirait  au renoncement à tout combat et à l'abandon de toute espérance de libération humaine.
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