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Aux editions Aden est paru en 2006 la troisième édition, imposée alors par l'actualité en Irak, d'un petit livre Retour sur "La question", composé d'entretiens avec Gilles Martin. (http://www.aden.be/index.php?aden=retour-sur-question)
L'actualité, en Libye cette fois, montre l'importance de l'apport de Henri Alleg sur nombre de questions en relation avec la guerre d'Algérie, la torture, l'indépendance, réflexion portée par ce qui selon lui a tant manqué à Camus pour reconnaître et s'associer à la lutte des Algériens : l'anti-impérialisme.
Nous reprenons ici sa réponse à une question de Gilles Martin :
Question : Revenons un peu sur cettte pétition. Parmi ses signatures prestigieuses, on note l'absence de celle d'Albert Camus ...
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Effectivement. Mais pour ceux qui connaissent la position ambigüe qu'a toujours eue Camus à propos de l'Algérie, il n'y a rien là de surprenant. C'est une légende, entretenue volontairement par les silences de Camus, que sa prétendue adhésion à l'idée d'une Algérie indépendante.
Certains - jusque dans des biographies récentes - laissent croire que, membre du Parti communiste à Alger dans les années 30, il en sortit parce que le PCA ne prenait pas suffisamment en compte les aspirations nationales des Algériens. C'est tout le contraire. Il quitte les communistes au moment justement où le Parti s'engage dans un sens de plus en plus "algérien" et unitaire avec les différentes forces nationalistes.
Cette orientation de Camus se manifestera clairement lorsqu'éclatera l'insurrection et pendant toute la guerre. Certes, il souffre de ses conséquences dramatiques, appelle de ses voeux l'arrêt des violences, mais renvoie dos à dos les patriotes qui combattent pour l'indépendance de leur pays et l'armée coloniale. Et, pour conclure, il se tait.
Pas seulement sur la question algérienne dans son ensemble, mais sur les méthodes utilisées pour briser la résistance populaire. En fin de compte, malgré ses articles courageux parus dans Alger républicain en 1939 pour dénoncer la misère des populations ou les manoeuvres frauduleuses de l'administration française, compllce des gros colons, il n'a jamais attaqué la légitimité du système colonial lui-même.
Il n'a jamais non plus mis en évidence l'existence d'un problème national en Algérie. En ce sens, sa position rejoint celle de nombreux pieds-noirs libéraux, sincèrement scandalisés par la condition faite aux Algériens et partisans d'une réelle égalité entre ceux-ci et les Européens, mais n'allant pas jusqu'à comprendre et encore moins à accepter l'idée d'indépendance.
Que sait-il d'ailleurs de cette Algérie coloniale? A le lire, on pourrait croire qu'entre la fin de la Tipaza romaine et la conquête du pays par la France, il ne s'y est rien passé. Il ignore les siècles glorieux de cette civilisation arabe qui a si profondément imprégné l'Algérie.
Et, dans ce pays où il est né et qui sert de cadre à certaines de ses oeuvres, les Algériens, quand ils sont présents, apparaissent presque comme des étrangers. Pour me résumer, et, pour utiliser un vocabulaire marxiste qui ne plaît pas à tout le monde (mais tant pis), il n'a été ni anti-impérialiste ni partisan conséquent de l'indépendance des peuples.
Henri Alleg
Retour sur « La Question »
2ème édition revue et augmentée
L’usage de la torture en Irak par l’armée américaine et l’exhumation d’une loi de 1955 (qui servit à imposer l’État d’urgence pendant la guerre d’Algérie) pour maintenir l’ordre dans les banlieues françaises montrent que les blessures issues du colonialisme ne sont pas refermées. Dans ce livre, Henri Alleg explique qu’« il n’est pas exclu que surgissent d’autres conflits comme l’Algérie où l’on appelle de jeunes Français à intervenir pour “combattre le terrorisme”, “sauver la démocratie” et “défendre la liberté”, alors que le vrai motif d’intervention sera d’exploiter gisements de pétrole, de gaz, de minerai, de diamants et d’empêcher tel peuple de se libérer. »
La Question est un livre clé de l’histoire de la guerre d’Algérie. Alleg y raconte les tortures qu’il a subies de la main de l’armée française. Il y raconte sa résistance, son refus de céder face à l’inacceptable. Aujourd’hui, plus de quarante ans après les faits, Henri Alleg revient grâce à ce livre sur cette guerre. Il montre comment les différents gouvernements français ont organisé l’amnésie dans la population pour mieux cacher leurs crimes. Comment le colonialisme fut l’école du racisme pour des centaines de milliers de français et comment nous en payons encore le prix. Les scores électoraux de Le Pen ou les discours de Sarkozy ne nous démentiront pas.