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Fin de notre semaine avec Jean-Marc Rouillan. Pas de votre lecture, nous l'espérons. Car le livre témoigne d'une volonté, d'une capacité de lutte qui transmet d'autant plus l'espoir qu'il est écrit avec une force, un humour, une conviction qui ne se démentent pas tout au long des pages .
Nous aurions pu choisir n'importe quel autre extrait : comme le récit des actions innombrables relatées dans le livre et qui témoignent avec force de ce qu'est concrètement le combat armé et qui nous laissent sans voix.
Cette volonté, cette capacité de résistance nous apparaît exceptionnelle, comme nous apparaissent exceptionnels les militants qu'il évoque, Cricri, Mario, Ratapignade .. et le livre nous semble un hommage vibrant à leur action.
De mémoire (3), nous fait vivre la courte saison des Gari, comme un tourbillon effréné et réfléchi d'actions, comme un hymne à la résistance, à la réflexion et à l'action politique.
Nous terminons cette semaine par ce très beau texte presque de fin de De mémoire (3) en souhaitant avoir donné aux visiteurs du blog le désir de le lire.
Une semaine avec Jean-Marc Rouillan. Extraits de "De mémoire (3)"
Editions Agone - 2011 - P 112
6. J'avais besoin de marcher
J'avais besoin de marcher malgré la pluie fine. Je ne parvenais pas à mettre des mots sur mes sentiments mais je savais - tout mon corps savait - que c'était fini. La page était tournée. Tout en haut de cette page, il était écrit les premiers mots de l'histoire d'un jeune lycéen au lendemain de Mai 68. Un enragé qui fréquentait les vieux révolutionnaires espagnols. E avec lui ses copains d'école et ceux du quartier. Et d'autres gars et d'autres filles. Nous avions vécu et combattu entre Toulouse et Barcelone. Jusqu'à ce soir d'hiver. "Nous" signifiait quelque chose de vraiment intime et de fort. Des sentiments véritablement humains. Sur Gran Via, la pluie frappait mon visage. Si je pleurais, personne ne s'en apercevrait. Je croisais des lieux connus et des immeubles où j'avais vécu.
Tout au bout de l'avenue, comme si j'étais placé derrière l'écran, je pouvais lire à l'envers le mot fin et le début du générique. Dans le rôle de Jann-Marc Rouillan, Jean-Marc Rouillan. Salvador Puig Antich est Salvador Puig Antich. Mario Ines Torres est Mario Ines Torres ... Et ansi de suite toute la liste. Oui, l'histoire se terminait ainsi. Bêtement, sans coups de feu. Sans explosion de dynamite. Sans menottes qui se bouclent. Sans l'hémoglobine sur le le trottoir. Banalement. Un homme marchait sur un trottoir trempé. Son enfance et son adolescence s'enfuyaient. Il savait déjà que son nom circulait sur toutes les lèvres au commissariat central de la via Laietana. Qu'ils préparaient son arrestation. Demain il fuierait et repasserait la frontière. Cet homme aurait voulu monter au cimetièrede Montjuïc saluer Durruti et plus loin son ami exécuté un matin de mars 1974. Il n'y était pas allé depuis qu'il revenait à Barcelone, il n'en éprouvait pas le besoin, il poursuivait la lutte, leur lutte ... Leur belle et généreuse guerre. Et maintenant il savait qu'elle était finie et qu'il était un autre. Un autre homme dans une autre histoire ...
Une semaine avec Jean-Marc Rouillan
2. "Franco has muerto". De mémoire (3), Jean-Marc Rouillan
3. La cour de sûreté de l'Etat. De mémoire (3), Jean-Marc Rouillan
4. Charlie Bauer. De mémoire (3), Jean-Marc Rouillan
5. Une des dernières résolutions du Mil. De mémoire (3), Jean-Marc Rouillan
6. "J'avais besoin de marcher ..." De mémoire (3), Jean-Marc Rouillan
Le livre aux Editions Agone
http://atheles.org/agone/memoiressociales/dememoire3/index.html
Parution : 14/10/2011
ISBN : 978-2-7489-0141-2
352 pages
12 x 21 cm
22.00 euros