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L'Internationale

L'Internationale, 1983. Le premier numéro d'un journal paraît, qui reprend le titre de celui publié en 1915 par Rosa Luxemburg - emprisonnée - alors que s'affrontaient les peuples entraînés dans la plus grande des boucheries par le capitalisme, l'impérialisme, et alors que s'étaient ralliés à celle-ci les partis de l'Internationale. En 1919, ceux-ci mettront à mort celle qui avait résisté et qui pour cela avait été emprisonnée. L'internationale 1983 comptera 11 numéros, avant de devoir s'arrêter momentanément : Il témoignera de luttes - et certains qui menèrent ces luttes sont encore aujourd'hui emprisonnés. Il réfléchira à l'évolution du capitalisme - et cette réflexion reste toujours aussi nécessaire. Le blog linter est la chronique d'un journal, c'est par là même la chronique des luttes menées alors, cela pourra être aussi la chronique de luttes menées ... aujourd'hui.

      

       SONJA SUDER EST LIBRE         Procès C. Gauger, S. Suder: Une page pour s'informer 

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Aux camarades, visiteurs du blog, bienvenue ...
Aux camarades qui viennent de rejoindre le blog, bienvenue. A ceux aussi qui lui rendent visite à l'occasion, bonjour. Le combat n'est jamais un échec, s'informer est déjà un pas vers la conscience. L'ordre et la sécurité ne sont pas le désir de tous, s'aliéner par tous les moyens de la société d'aujourd'hui ne nous intéresse pas. Nous ne cherchons pas à exploiter l'autre. Nous ne tournons pas la page des combats passés, ils sont partie de nous. Et chaque mot que nous lisons, chaque image  que nous voyons, contribue à nous former. Nous ne sommes pas dupes. Nous sommes solidaires. Nous chassons les chasseurs d'enfants. Et nous sommes  le jour face à la nuit sans cesse renouvelée de la violence et de l'oppression. Il n'y a pas d'âge pour la révolte. Et 68 rejoint l'esprit de la Bastille de ce 6 mai où les pavés ont su de nouveau voler. La révolte est une et se rit de toutes les différences.

Pour tous ceux qui viennent sur ce blog, qui font "la route des insoumis" que décrit Nathalie, qui sont et seront les révolutionnaires de demain dont parle Jean-Marc, qui se reconnaissent ce droit à l'insurrection que revendique Georges. Pour chacun, ce collage de Joëlle, mieux qu'un bras d'honneur, à tous ceux qui sont ce que nous refusons.

La queue de la baleine, Nathalie, nous ne la lâcherons pas!

Archives

Joëlle Aubron

Sur ce collage, un poème. linter
C'est l'automne, et ce n'est pas l'automne,
Ces femmes qui marchent
Des combattantes?
Des femmes qui marchent?
Vie de tous les jours ou vie d'exception?
Guerre d'Espagne,
Journées d'après occupation?
Journées d'après l'occupation?
La vie est simple
comme l'est souvent le combat

Entre l'or du feuillage
et le noir et blanc de la vie
Cette image sensible

Georges lors d'une audience devant le JAP en 2005
En tout premier lieu, du fait qu'il va être question ici de mes inclinaisons politiques et de mon évolution depuis 1987 au sein du monde carcéral, je tiens à faire une déclaration de principe : ainsi, conformément à la Constitution de la République française de 1792, repris par l'Article 35 du 26 Juin 1793 *, stipulant un droit à l'insurrection, qui a servi à Valmy pour sauvegarder et étendre la révolution, qui a servi en 1871 avec la Commune de Paris contre l'occupation Prussienne, qui a encore servi en 1940 contre l'occupation national-socialiste allemande et la collaboration pétainiste française, et pour encore servir concrètement après 1968 dans la plupart des pays d'Europe de l'Ouest avec l'insurrection armée larvée et latente contre chaque Etat capitaliste en place et contre l'OTAN ; une Constitution qui après avoir servi depuis son avènement de réfèrent à la plupart des peuples de par le monde pour se libérer des différents maux entretenus que sont, soit l'occupation étrangère, soit l'oppression de classe, soit l'exploitation de l'homme par l'homme jusqu'à l'esclavagisme, leur a ouvert une perspective politique. Et dès lors dans l'assurance qu'elle restera de même une référence au futur pour tous les peuples épris de Liberté, d'Egalité, de Fraternité et de Démocratie, conformément à cette Constitution de 1792 donc, je me refuse à abjurer ces moments historiques comme je me refuse à abjurer la stratégie de Lutte Armée pour le communiste, qui en est une expression particulière.
(
Georges Cipriani  MC Ensisheim, 49 rue de la 1ère armée 68 190 Ensisheim)


Jean-Marc dans une interview en 2005

C'est la question centrale (la question du repentir) depuis notre premier jour de prison. Et c'est le pourquoi de nos condi­tions de détention extraordi­naires, des restrictions actuelles sur le droit de communiquer ou de la censure des correspon­dances. Dans aucune des lois de l'application des peines, il n'est stipulé que le prisonnier doit ab­jurer ses opinions politiques. Mais pour nous, certains procu­reurs n'hésitent pas à affirmer que les revendications du com­munisme impliquent une récidive. Je sais bien que si nous nous repentions, nous serions soudai­nement adulés par la bonne so­ciété, mais ce n'est pas notre vi­sion de la responsabilité poli­tique. Notre engagement n'est pas à vendre ni à échanger contre un peu de liberté.
(Jean-Marc Rouillan 147575 Cd des baumettes, 230 Chemin de Morgiou Marseille Cedex 20

Joëlle à sa sortie le 16 juin 2004
Je suis fatiguée, aussi je dirai seulement trois choses :
La première est d'être bien sûr contente d'avoir la possibilité de me soigner.
La seconde est que l'application de la loi de mars 2002 reste cependant pour de nombreux prisonnières et prisonniers très en deça de son contenu même.
La troisième est ma conscience de ce que la libération de mes camarades est une bataille toujours en cours. Régis est incarcéré depuis plus de 20 ans, Georges, Nathalie et Jean-Marc, plus de 17. Je sors de prison mais je dois d'abord vaincre la maladie avant de pouvoir envisager une libération au sens propre. L'objectif reste ainsi celui de nos libérations.

Nathalie, en février 2007

Cependant, pour nous, militant-e-s emprisonné-e-s du fait du combat révolutionnaire mené par l’organisation communiste Action directe, nous sommes sûrs de notre route : celle des insoumis à l’ordre bourgeois. Tant que des femmes et des hommes porteront des idées communistes, les impérialistes au pouvoir frémiront jusqu’à ce que la peur les gèle dans leurs manoirs sécurisés à outrance.

15 février 2008 5 15 /02 /février /2008 19:44
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CQFD N°052 -
CQFD CUISINE SON EX-CORRESPONDANT AU PENITENCIER
undefinedCollage de Joëlle Aubron

JANN-MARC ROUILLAN RACONTE SA SEMI-LIBERTE

Mis à jour le :18 janvier 2008. Auteur : Gilles Lucas, Nicolas Arraitz.

Comme nous l’avions annoncé, notre correspondant permanent au pénitencier change de poste. En attendant qu’il reprenne ses marques et nous écrive une chronique de son retour (pour l’instant intermittent) au pays du dehors, nous avons bavardé avec lui autour d’un café brûlant. Alors, Jann-Marc, dis-nous un peu…

Jann-Marc Rouillan : Je ne sais pas ce que ça va donner en parole libre…

CQFD : T’en fais pas, on va te cuisiner proprement !
J.-M. : Ça va être ma fête ? Je préfère écrire une chronique, finalement ! [rires]

Tu as déjeuné ?

J.-M. : Oh oui ! Ma journée commence à 5 heures. À 6h50, je suis prêt. Plus vite je décarre, mieux c’est. Moi qui ai toujours été contre le boulot, les jours fériés me filent les boules ! Le week-end, c’est férié de chez férié : enfermé à double tour ! Là où nous sommes, il n’y a rien. Le couloir, une mini-cour de promenade. Les discussions entre taulards. Un peu plus variées que d’habitude : comme les gars sortent, ils ont plus de choses à raconter. Des embrouilles à cause des gremlins, qui se volent, se chicorent. Ce sont des peines courtes, des jeunes mecs qui se foutent de « remonter en haut », en grand quartier, pour reprendre leur peine normale. Dans les centrales de sécurité (CS), on n’a pas de contact avec ce genre de population pénale. Les CS, c’est 2 à 3 000 personnes en France. Plus 2 à 300 mecs en quartier d’isolement. Une population très réduite dans la masse des prisons. Moi je n’ai jamais connu la détention normale. La haute sécurité, c’est un régime pénitentiaire qui devrait durer deux, trois, cinq ans pour les mecs les plus chauds, mais nous, nous y avons fait toute notre détention. Sauf Nathalie et Joëlle : au bout de douze ans de maison d’arrêt (déjà un record), on les a envoyées au centre de détention de Bapaume, par manque de CS pour femmes.

Tes nouvelles conditions de détention ?

J.-M. : Plus de confort, plus de liberté de circulation, nous avons la clé de la cellule, mais ce n’est que le droit de s’enfermer soi-même ! On y est confronté à une population en état de délabrement social, intellectuel, culturel… Les gremlins ne regardent que MCM : des clips R’n’B, toujours les mêmes, et des pubs pour jeux vidéos. Que peuvent-ils faire dehors… Peut-être portier, ou vigile, pour ne pas perdre l’habitude de tenir les murs… Il y en a un qui bosse comme croque-mort. Dimanche, ils ne voulaient pas le laisser sortir. Il a dit : « Mais enfin, il faut bien que j’aille enterrer les gens ! » Voilà sa réinsertion : le jour il creuse des tombes, la nuit il dort en prison. C’est dur à dire, mais pour moi, la liberté c’est le travail… Cet après-midi, je serai en RTT, et mes RTT je les passe aux Baumettes. Putains de 35 heures ! Elles me renvoient en taule ! Pour situer cette liberté par le travail, il faut connaître l’histoire de la zonzon. Pour recadrer les classes dangereuses, le vagabondage, la petite délinquance, il y a eu le travail obligatoire, les galères, le bagne… C’est le travail pénal qui a introduit la prison. Là, avec la nouvelle méthodologie, la probation fait suite à la prison. C’est compliqué, le crédit de peine. Avant, on te donnait des grâces. Là, on te « prête » des jours en moins, mais à la fin, tu tombes dans le cycle de la probation et si tu ne te soumets pas aux exigences (travail, domicile et assignation), le juge d’application des peines peut te les faire payer, cash. Et tu replonges. On ne veut pas que les mecs partent dans la nature, alors on a trouvé un système pour qu’ils fassent non seulement leur temps en prison mais en plus, qu’après, ils soient soumis au travail obligatoire. Que tu bosses, dans un monde qui a réduit le marché du travail au minimum ! Avec la probation, on entre dans un système de rentabilisation, très américain, qui gère des mecs de plus en plus agressifs.

Une histoire de discipline sociale plus que de rentabilité, non ?

J.-M. : Oui, mais tu subventionnes ta probation sur ta paye ! Moi, on me laisse à peu près 650 euros par mois. Heureusement que je suis nourri-logé ! Imagine un mec isolé. La probation nous soumet au seuil de pauvreté.

Raconte-nous ta sortie.

J.-M. : Ce matin, j’ai demandé à la guichetière si 12 euros c’était le prix du ticket de bus à l’unité… Elle m’a regardé bizarrement. En fait, je n’ai jamais vécu normalement. Depuis mon adolescence, je suis passé de la clandestinité à la prison et de la prison à la clandestinité. Mon rapport à la normalité, c’est celui du clando qui doit ressembler aux gens qu’il croise dans la rue pour se fondre dans la masse. Je n’ai aucun rapport à l’argent, par exemple. Avant, nous avions notre organisation financière qui nous permettait de vivre sans travailler. Tu avais de l’argent pour faire semblant, pour meubler ta planque… J’ai eu la première fiche de paye de ma vie, là, début janvier.

Comment ça s’est passé quand ils t’ont lâché sur le trottoir, le premier jour ?

J.-M. : Tous les chefs étaient là, à 6h50, dans la cour d’honneur. Quand ils ont réalisé que je n’avais jamais eu de perm’, ils ont paniqué. Comment me gérer ? Nous sommes sortis dans un fourgon banalisé, avec vitres fumées, et on m’a éjecté devant l’arrêt de bus de l’église de Mazargues, avec ces platanes taillés, fantomatiques. J’étais encadré par deux éducatrices, comme des gendarmes. Au boulot, nous étions assiégés par la presse, il ne fallait pas que je m’approche des fenêtres. Dans le métro, les vigiles sont intervenus avec les chiens pour écarter les journalistes et permettre la fermeture des portes. Les passagers étaient assez sympas. Deux petites beurettes sont venues me demander : « Mais vous êtes une star de quoi ? » J’ai dit : « Je suis une star de la justice. » Après, j’ai vu qu’il y avait ma photo prise à mon arrivée le matin dans un gratuit du soir. Donc, les gens (qui ne lisent que ça, c’est impressionnant) connaissaient ma gueule. Quelle impression de vide aujourd’hui dans le métro ! Avant, tu voyais les gens lire Libération ou L’Huma en partant bosser. Les longues peines veulent savoir ce qui se passe dehors, mais dehors, les gens ont perdu pied, au niveau intello. Même les murs ont perdu la parole. À part les grafs de la culture hip-hop, qui se résument à la signature de l’auteur… Au restau, les conversations… Communiste ? Soixante-huitard ? C’est ringard ! La critique sociale est réduite à des cercles isolés. En 68, j’étais lycéen, c’est passé vite. On a eu le temps de jeter quelques pierres et puis c’était fini. Mais après, en 69-70, le mouvement antagonique s’est structuré, il y avait des manifs tous les jours. Je suis resté sur cette lancée.

On est à Marseille. Rien ne bouge, puis quand il y a un mouvement, les plus grosses manifs, c’est ici.

J.-M. : Je sais que Marseille est une ville paradoxale, avec une grande histoire sociale. Pas mal de gens m’ont salué dans la rue. Aux Baumettes, les gremlins sont venus me dire « Monsieur, on te voit sur M6 ! » : j’étais entré dans leur réalité ! À Paris, je n’irai pas avant longtemps. J’ai au moins un an de semi-liberté, plus dix ans d’interdiction dans trente-neuf départements (ça date de la fin du xixe siècle : tous les départements frontaliers, toutes les villes de plus de 200 000 habitants…). Ma semi-liberté peut être maintenue jusqu’à trois ans. Avant, les agents de probation considéraient qu’il ne fallait pas dépasser un an, car après, ça devient pesant et le mec risque de se mettre en cavale. Maintenant, ils s’en foutent, si tu ne rentres pas on te considère comme évadé, et tu retournes au mitard, puis à ta peine initiale.

La conditionnelle, ça veut dire que tu ne retournes plus en taule le soir ?

J.-M. : Voilà. Tu dois bosser, pointer, payer de très grosses sommes à la partie civile, passer tous les mois devant le juge. Sans aucune prime, ni alloc’, ni aide de retour à l’emploi, et tu dois payer un loyer, avoir un domicile fixe… Frappé d’infamie : interdiction de faire de la politique, de voter…

Autre impression sur l’existence dehors ?

J.-M. : Je ne peux pas sortir le soir… Ma vision est partielle. L’autre jour, arrivé trop tôt, j’ai marché dans les rues pendant une heure. Je suis arrivé en haut des escaliers de Saint-Charles, au lever du jour. Tu sais, les vieux taulards se disent : « On ne regardait pas assez les endroits où on vivait, dehors. » Là, je me suis arrêté et j’ai regardé la ville. En taule ou quand tu apprends que tu n’en as plus pour longtemps, tu entres dans un autre rapport à l’existence. Moi j’ai eu les deux : la taule et le toubib qui m’a dit « Vous n’en avez plus que pour deux ans »… Bon, ça s’est arrangé depuis. Là, ton quotidien prend un autre timing. On arrête tout, on prend le temps de regarder.

C’est une nouvelle vie qui commence ?
J.-M. : Non, pas du tout. Sinon ce serait un enterrement. Si je renonçais à cette vie qui a commencé pour moi en Mai 68, je crèverais.

Publié dans CQFD n°52, janvier 2008. (N'hésitez pas à aller sur le site du journal, à vous abonner. C'est rare un journal comme celui-là. rare ...)

 
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22 janvier 2008 2 22 /01 /janvier /2008 07:25
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Jean-Marc "en parole libre"
"Nous avons la clé de la cellule. Mais ce n'est que le droit de s'enfermer soi-même "

Le numéro de CQFD est sorti avec une discussion avec Jean-Marc semi-libre. Ici le début du texte.

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JANN-MARC ROUILLAN RACONTE SA SEMI-LIBERTE
Mis à jour le :18 janvier 2008. Auteur : Gilles Lucas, Nicolas Arraitz.

Comme nous l’avions annoncé, notre correspondant permanent au pénitencier change de poste. En attendant qu’il reprenne ses marques et nous écrive une chronique de son retour (pour l’instant intermittent) au pays du dehors, nous avons bavardé avec lui autour d’un café brûlant. Alors, Jann-Marc, dis-nous un peu…

Jann-Marc Rouillan : Je ne sais pas ce que ça va donner en parole libre…

CQFD : T’en fais pas, on va te cuisiner proprement !
J.-M. : Ça va être ma fête ? Je préfère écrire une chronique, finalement ! [rires]
 
Tu as déjeuné ?

J.-M. : Oh oui ! Ma journée commence à 5 heures. À 6h50, je suis prêt. Plus vite je décarre, mieux c’est. Moi qui ai toujours été contre le boulot, les jours fériés me filent les boules ! Le week-end, c’est férié de chez férié : enfermé à double tour ! Là où nous sommes, il n’y a rien. Le couloir, une mini-cour de promenade. Les discussions entre taulards. Un peu plus variées que d’habitude : comme les gars sortent, ils ont plus de choses à raconter. Des embrouilles à cause des gremlins, qui se volent, se chicorent. Ce sont des peines courtes, des jeunes mecs qui se foutent de « remonter en haut », en grand quartier, pour reprendre leur peine normale. Dans les centrales de sécurité (CS), on n’a pas de contact avec ce genre de population pénale. Les CS, c’est 2 à 3 000 personnes en France. Plus 2 à 300 mecs en quartier d’isolement. Une population très réduite dans la masse des prisons. Moi je n’ai jamais connu la détention normale. La haute sécurité, c’est un régime pénitentiaire qui devrait durer deux, trois, cinq ans pour les mecs les plus chauds, mais nous, nous y avons fait toute notre détention. Sauf Nathalie et Joëlle : au bout de douze ans de maison d’arrêt (déjà un record), on les a envoyées au centre de détention de Bapaume, par manque de CS pour femmes.

Tes nouvelles conditions de détention ?
J.-M. : Plus de confort, plus de liberté de circulation, nous avons la clé de la cellule, mais ce n’est que le droit de s’enfermer soi-même ! ...

La suite de l’interview de Jann-Marc Rouillan dans le numéro 52 de CQFD, actuellement en kiosques.

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10 janvier 2008 4 10 /01 /janvier /2008 22:35
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Pour ne pas ouiblier, ce qu'ont pu être ces 21 années de prison pour les militants d'Action directe et ce qu'est la prison pour nos camarades encore enfermés ....

JEAN-MARC ROUILLAN A TESTÉ POUR VOUS LA TORTURE À LA FRANçAISE

Mis à jour le :15 juin 2004. Auteur : Olivier Cyran.

Jann-Marc Rouillan écrivait dans CQFD depuis janvier. Tous les mois, notre « correspondant permanent au pénitencier » veillait, depuis son « bunker » de Moulins-Yzeure, à nous faire parvenir sa chronique en temps et en heure, bien calibrée pour tenir dans sa page, un vrai boulot de pro, tel qu’on n’en voit pas chaque jour dans un canard de chômedus ensoleillés. Quand son papier nous arrivait par un chemin détourné, on oubliait, le temps de la lecture, que l’auteur de cette prose gorgée de vie ne serait une fois de plus pas là pour l’apéro. Ce gars qui survit en taule depuis dix-sept ans, dont les camarades agonisent sous la semelle implacable de l’administration carcérale, ce gars qui nous soutient plus que nous ne le soutenons et que nous n’avons jamais vus, on s’était vite habitué à le considérer comme un collègue, un pote. Mais ce mois-ci, pas de Jann-Marc dans CQFD. Depuis son transfert à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis le 18 mai, et suite aux violences crapuleuses perpétrées contre lui par des surveillants encagoulés, notre collaborateur n’est plus en mesure d’honorer son rendez-vous mensuel : placé en isolement, privé de tout moyen de communication, il a de fait été réduit au silence.

Bien sûr, cette muselière est peu de choses comparée à la serviette avec laquelle les Équipes régionales d’intervention et de sécurité (ERIS) l’ont baillonné à l’aube de son transfert. Les ERIS, comme nous dit Bernard Ripert, l’avocat de Rouillan, c’est un « corps de mercenaires créé pour casser du détenu ». Encagoulés tels les bourreaux de la place de Grève, pour pouvoir cogner incognito, les membres des ERIS ont donc réveillé Jann-Marc au petit matin du 18 mai. Ils lui enfoncent une serviette dans la bouche, le frappent, le déshabillent, le traînent nu à travers la taule puis l’obligent à se mettre à genoux, toujours nu, devant le directeur de la centrale, Richard Bauer, qui aurait alors « détourné les yeux ». Trois autres détenus ont subi le même sort. « Ces traitements inhumains et dégradants ressemblent beaucoup à ce qui a été dénoncé à la prison d’Abu Ghraïb à Bagdad », observe Bernard Ripert. Selon lui, en près de vingt ans de cabane, Rouillan n’avait jamais vécu ça. Pour la première fois, il portera donc plainte pour « coups et violence ». Sans le moindre espoir qu’elle aboutisse, mais pour forcer les donneurs d’ordre à se donner au moins la peine de tricoter une explication.

L’administration carcérale justifie le transfert de Jann-Marc par une imputation qui a toutes les apparences d’une dinguerie : notre collaborateur aurait affrété un hélico depuis sa cellule de Moulins-Yzeure... Si elle était fondée, une telle accusation visant un homme malade, vraisemblablement atteint d’un cancer aux poumons, aurait de quoi forcer le respect. D’autant qu’au moment où il était supposé fomenter son plan d’évasion, Jann-Marc s’apprêtait à déposer une demande de libération - en se doutant, il est vrai, qu’elle finirait dans la même poubelles que celles déjà formulées par les presque mourantes Nathalie Ménigon et Joëlle Aubron. De toute façon, pour s’échapper de la centrale ultra-sécurisée de Moulins-Yzeure, un hélicoptère seul ne suffit pas : il y faut aussi un fabuleux trésor d’imagination. Entièrement recouverte de filins de sécurité, équipée d’un double mur d’enceinte de six mètres de haut et dotée de cent cinquante surveillants, ce bunker est régulièrement vanté par l’administration carcérale comme « la prison la plus sûre d’Europe ». Quiconque se retrouve dans ce cul de basse-fosse éprouve très certainement le désir d’en sortir. Mais du désir au projet, puis du projet à sa mise en œuvre, il y a toute les marges qui séparent un rêve de liberté d’un forfait punissable de torture.

Le jour du transfert, les autorités pénitentiaires affirmaient détenir des « preuves sérieuses confirmant les soupçons » portés contre Rouillan. Pourquoi ces preuves n’ont-elles pas été communiquées à la justice ? Il est loufoque qu’aujourd’hui, quand le moindre citoyen ayant affaire à la force publique encourt des poursuites pour outrage à agents, aucune information judiciaire n’a été ouverte à l’encontre d’un détenu « dangereux » soupçonné de vouloir griller la politesse à une citadelle en béton armé. Sa mise au secret à Fleury, dans une maison d’arrêt parfaitement inadaptée aux longues peines (à supposer qu’existent des lieux susceptibles de s’adapter à une perpétuité sous les verrous), achève le tableau. Voici Rouillan en quartier d’isolement, dans les murs de l’ex-QHS remis en fonction il y a seulement trois mois. Jusqu’à quand ? Pas moyen de savoir. En quelques mots qu’il a pu nous faire glisser, Jann-Marc nous rassure néanmoins : « Dans ce QI disciplinaire, au moins, question environnement, on respire ! » Quant à l’interdiction faite à notre correspondant de s’exprimer : « Je n’ai vu aucune intervention de Reporters sans frontières... Bizarre, non ? » Parce qu’en plus, ce con a de l’humour.

Publié dans CQFD n°13, juin 2004.

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27 décembre 2007 4 27 /12 /décembre /2007 09:56
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Article du 2 décembre, publié à nouveau pour soutenir argone
  02.12.07 Message de liberez-les: "Les Editions Agone seront l'employeur de Jean-Marc Rouillan après le résultat du jugement d'appel que nous connaîtrons le 6 décembre et qui espérons le, donnera la semi liberté conditionnelle à notre camarade.". 26.12.07: Jean-Marc a commencé à travailler à Argone le 17.12. 
Premier pas ... vers la liberté!
on-se-calme.jpg(carte de Bruno Baudrillart. Que nous aimons associer, en souriant, à Jean-Marc. linter)
 Pour nous aider a financer la production de nos livres, nous lançons, cette annee encore, une souscription sur (presque) toutes nos parutions 2008. Celle-ci est ouverte aux membres de la «Societe des lecteurs et des lectrices d’Agone», structure que nous mettons progressivement en place depuis deux ans dans le cadre de l’association loi 1901 qui porte les editions Agone, avec le souci de rester en accord avec les usages et la loi sur le prix unique du livre. L’adhesion annuelle, d’un montant de 10 euros, vous permettra jusqu’au 15 janvier prochain, date de parution du premier livre en librairie, d’acheter par avance tout ou partie des nouveautes 2008 avec une remise de 30% sur le prix public ou de vous abonner a la revue avec une remise de 50%.  Ce faisant, vous nous permettrez d’accorder a ces livres tout le soin necessaire. Merci pour votre soutien et pour l’interet que vous accorderez aux textes que nous continuons d’editer.
Vous pouvez telecharger le bon de souscription ici: http://atheles.org/doc/agone/souscription2008.pdf

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22 décembre 2007 6 22 /12 /décembre /2007 23:58
 
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undefinedJamais!!
Carte de Bruno Baudrillart, réalisé alors qu'il était emprisonné

Rouillan change de poste

Un jour, un « stagiaire » répond au téléphone. La gueule enfarinée, il baragouine quelques trucs du style « si tu crois que je connais tous les abonnés ». Et après avoir raccroché : « J’ai rien compris, c’était un certain Jean-Marc… De Lannemezan… » Depuis, dès que le turlu sonne à côté de lui, nous le taquinons avec sa bourde. Quant à Jann-Marc, tous les mois depuis le numéro 6, soit janvier 2004, il nous écrit sur sa condition de taulard longue durée. Chaque mois, nous attendons sa chronique avec impatience, sans trop savoir par quel canal elle va nous parvenir. Il est même arrivé qu’il nous dicte sa prose par téléphone. Mais en quatre ans, le bougre n’a fait faux-bond qu’une fois, bien malgré lui : au printemps 2004, placé à l’isolement, l’administration pénitentiaire ne lui laissa même pas un crayon à papier. « Il est là, le “Rouillan” ? » est une question courante en début de mois. Suivie immanquablement de : « Il est bien, le dernier “Rouillan”, hein ? », après lecture. Mais pas une fois, et pour cause, le Rouillan ne s’est pointé au journal pour boire l’apéro et fêter la sortie du canard. Pas une fois, mais ce sera pour la prochaine : le 6 décembre, la cour d’appel de Paris a fini par lui accorder un régime de semi-liberté. La veille, Jann-Marc nous a passé un coup de fil : « Vous allez peut-être perdre votre correspondant permanent au pénitencier », disait-il d’un ton guilleret. Qu’à cela ne tienne, te voilà bombardé correspondant intermittent au pays du dehors !

L’équipe de CQFD

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22 décembre 2007 6 22 /12 /décembre /2007 22:08
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Un ancien texte de Jean-Marc Rouillan (2000) en commentaire au livrede L. Wacquant, les prisons de la misère et qui souligne sa conception de classe de "l'Etat pénal"
.
lettre
Cher Monsieur,

Votre livre nous est parvenu et je tiens à vous en remercier au nom de mes co-détenus. Depuis, il circule de cellule en cellule. J’ai déjà dû en colmater la structure à grands renforts de ruban adhésif !

J’ai la certitude que ce travail apporte une conscience nouvelle à tous ceux qui vivent, dans leur chair et leur esprit, le durcissement des politiques pénales. Je le constate dans nos discussions. Les détenus sont d’autant plus intéressés et troublés que vous allez au-delà de leur situation carcérale pour non seulement la dénoncer, mais lui donner un sens et une approche globale et transnationale – l’allongement des condamnations, le recul des mesures d’application des peines, la lente agonie des centres scolaires et des activités culturelles…

En tant que prisonnier révolutionnaire, j’oppose malgré tout à votre démonstration quelques critiques ; essentiellement à propos de votre défense d’un État social (illusion) face à l’État pénal actuel. Pensez-vous que le capitalisme puisse réellement survivre sans le rapport de force qu’il impose aujourd’hui ? Le néolibéralisme n’était-il pas la seule solution possible (du point de vue de la bourgeoisie) à la crise du fordisme ? Le saut à un nouveau modèle d’accumulation ne reposait-il pas avant tout sur la répression du prolétariat et de ses aspirations, et ne se reproduit-il pas en réprimant les misères et les révoltes produites par la qualité de précarité globale ? Sans peur de passer pour un incorrigible « paléobolchevik », un « incompatible », je dirai qu’il est impossible de situer l’État pénal (et son devenir) sans une étude de la composition/lutte des classes dans l’ensemble du système impérialiste.

Merci de votre attention ¡ Venceremos !
Salutations révolutionaires

Jean-Marc

Centrale de Lannemezan, le 10 avril 2000

Jean-Marc Rouillan
1379 B 202
Centrale de Lannemezan
65307 Lannemezan CEDEX


   

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18 décembre 2007 2 18 /12 /décembre /2007 06:51
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Premier jour de semi-liberté pour jean-Marc

bruno2-1.jpg17 décembre, premier jour
Il est des combats
qui donne à chacun
la force de continuer à combattre
  
17 décembre, "premier matin"
Il est des matins où ces combats
prennent tout leur sens

17 décembre,

Jean-Marc, après Nathalie,
- et avant Georges, nous l'espérons -

libre
(Enfin presque libre!)
(carte de Bruno Baudrillart)

En ce jour, dire que le combat n'est jamais fini, qu'être aux côtés de ces militants qu'ils soient emprisonnés, semi-libres, libres est essentiel. 

En ce jour, rappeler, que le premier combat des militants d'action directe ces vingt dernières années a été et est avant tout de rester au sein du combat révolutionnaire, pleinement conscients, car rien de ce pour quoi et contre quoi ils ont lutté, n'a changé.

Rappeler que le principal objet de leur lutte pour la libération conditionnelle a été et est de ne pas renier leurs combats face à des juridictions qui ne demandaient que cela pour prix de leur liberté.

En ce jour, rappeler le combat de Joëlle Aubron et sa déclaration à sa sortie de prison, sortié arrachée pour cause de maladie, de cette maladie qu'il l'a trop tôt emportée.

Joëlle à sa sortie le 16 juin 2004
Je suis fatiguée, aussi je dirai seulement trois choses :
La première est d'être bien sûr contente d'avoir la possibilité de me soigner.
La seconde est que l'application de la loi de mars 2002 reste cependant pour de nombreux prisonnières et prisonniers très en deça de son contenu même.
La troisième est ma conscience de ce que la libération de mes camarades est une bataille toujours en cours. Régis est incarcéré depuis plus de 20 ans, Georges, Nathalie et Jean-Marc, plus de 17. Je sors de prison mais je dois d'abord vaincre la maladie avant de pouvoir envisager une libération au sens propre. L'objectif reste ainsi celui de nos libérations.

Et finir par ces mots de Georges Ibrahim Abdallah, compagnon à Lannemezan de Jean-Marc, parce qu'ils sont toute la dignité des militants révolutionnaires:

Ainsi, aujourd’hui, les premières choses qui me viennent à l’esprit, c’est d’abord la joie que nous partageons tous en voyant certains de nos camarades d’AD arracher un statut qui les rapproche encore plus de la liberté.
Certes, cette victoire n’est pas complète. D’autres camarades d’AD sont encore en prison et surtout ils ne sont pas encore sortis complètement. » (blog liberonsgeorges ici)


linter, 18 décembre 2007
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17 décembre 2007 1 17 /12 /décembre /2007 05:36
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Tiens aujourd'hui, c'est le 17 et Jean-Marc doit mettre un pied dehors.

Oh, pas les deux non, ça c'est pour plus tard.
Mais c'est quand même comme pour Nathalie un jour unique
que ce jour où un air de liberté flotte dans l'air.
Alors en ce jour, pour rappeler en partie ce que furent les quelques 7000 jours
qui viennent de passer, sa chronique DES VINGT ANS   dans CQFD.


coquelicot-et-colombe16-copie-1.jpgcollage de Joëlle Aubron


CQFD N°042
DE NOTRE CORRESPONDANT PERMANENT AU PÉNITENCIER

VINGT ANS CHEZ LES SCHTROUMPFS

Mis à jour le :15 février 2007. Auteur : Jann-Marc Rouillan.

Quand la vengeance d’État s’acharne, on n’a pas le coeur à fêter ses vingt ans d’exil au pays du dedans. Oui, déjà vingt ans que les militant(e)s d’Action Directe croupissent en prison. Bien qu’ils soient aujourd’hui tous libérables, l’État refuse de leur appliquer ses propres lois, qui permettraient pourtant une libération conditionnelle. Au hit-parade du placard, un seul refrain : jusqu’à quand ?

VINGT ANS JOUR POUR JOUR que je suis au trou. Drôle d’anniversaire ! Et je ne suis pas d’humeur à souffler les bougies. Lorsqu’ils nous ont arrêtés près d’Orléans, la neige recouvrait la campagne comme à cette heure derrière le haut mur gris. Le matin était pâle et froid. Au milieu des hordes policières, de grands pontes des ministères jouaient des épaules pour apparaître sur les photos. Dans notre salle à manger, deux ou trois juges s’empoignaient par le revers du veston. Ils se traitaient de tous les noms en se disputant nos dépouilles judiciaires. Ils aiment tant la célébrité et leur pouvoir sur les hommes enchaînés. Une belle foire ! J’en souris encore quand, au hasard des rêveries, les images remontent à ma mémoire. Il y a si longtemps... À cette époque lointaine, sous le règne de Tonton Mitterrand, le mur de Berlin n’était pas encore tombé et l’URSS, comme la Tchécoslovaquie et la Yougoslavie, pas encore dépecée. On payait en francs et en enveloppes discrètes car tout s’achetait aux temps des fausses factures. Vingt piges ! Tout cela a changé à ce que me racontent mes amis. « Tu ne reconnaîtrais rien ou pas grand-chose ! » J’aimerais leur expliquer que je n’ai pas envie de faire le chemin à l’envers. Maintenant j’appartiens au pays du dedans. Je suis un être en conserve, ni encore mort, ni vraiment vivant. Qu’ils se rassurent, je suis bien, avec la mauvaise herbe. Au pied du mur, j’ai pris mes aises, tel le lierre et le chiendent. Et le temps a passé. Désormais, la culture des centrales m’imprègne de son encre indélébile. Je l’ai découvert comme on découvre une civilisation aborigène, un pays lointain aux moeurs étranges. Je n’étais pas affranchi, aujourd’hui je l’observe en vieux taulard agnostique.

Avec un instinct infaillible, je sens venir la patate et les riflades. Je renifle le malheur. Surtout lorsqu’il se joue sur le ton tragique. Parfois en passant sous l’échauguette, je repense au gars venu d’une île des Açores. Par surprise, quatre Yougoslaves l’ont troué au couteau, trois coups dans le bide et le quatrième à la gorge. En titubant, l’assassiné est remonté en cellule. À l’aide de serviettes humides, il a comprimé les blessures. Et la rage aux lèvres, il est redescendu une lame dans chaque main. Surpris, les adversaires se sont débandés. Et tel Horace, il les frappa un à un quand il les rattrapa. Le premier sous le préau, le second le long du grillage, le troisième dans l’autre cour et enfin le quatrième près de la grille de l’escalier que les matons refusèrent d’ouvrir. Les Yougoslaves crièrent beaucoup et supplièrent. Rien n’y fit. Sans pitié, le jeune fit entrer le métal dans la chair. Ici on tue pour que dalle. Pour cette comédie trompeuse derrière les barreaux. Pour le seul cinoche des jours vains. Tel est notre album de famille. Dehors, vous avez gravé les images de vos vacances en Italie, de votre première communion, de vos commémorations. Ici nous gardons en mémoire les bagarres. Le sang. Les rancoeurs à n’en plus finir. Les mots qui dépassent les mots. Les peines incompressibles. Les transferts disciplinaires. Les soirs de lutte bras dessus bras des-sous. Les rires et la fraternité malgré tout... Et la poussière du temps... Et son rien qui se conjugue par tous les temps et en toute saison... Et cette vie obligatoire, presque éternelle, avec nos congénères. Les méchants. Les fous. Les égarés. Les pauvres types. Les étrangers qui ont gardé la gamberge du dehors. Les incolores. Les boulots obsédés par retourner devant la machine. Les gremlins tombés des barres bétonnées des quartiers populaires. Les entêtés qui ont pourtant hérité d’une destinée de cul-de-jatte. Les désespérés. Les vicelards et leurs vices tatoués sur un coeur absent. Les irrécupérables. Et enfin, les bons mecs, bien meilleurs que ceux peuplant vos rues et vos palais. Telle est au XXIe siècle la faune des galères. Vingt piges que je suis devenu l’un d’entre eux. C’est ce que nos braves magistrats baptisent pompeusement : la réinsertion ! Mais sommes-nous si différents des gens du dehors ? Peut-être pas. De toute manière, je ne me souviens pas.

Dans cet espace clos, on ne sait jamais où s’arrête la justice et où commence l’injustice. Nos petits arrangements sont-ils légaux ou illégaux ? On s’en fout ! Tout est faussé, rien ne correspond au standard des ballots. Et en prison se mélangent jusqu’à l’écoeurement le vrai et le faux. Et puis, il y a les mythos. Les Poivre d’Arvor des coursives qui vous bidonnent l’info. Les Onassis et les Rockefeller des promenades calculant les intérêts de leurs fantasmes balourds. Peu importe le prix à casquer en mitard, certains mecs dealent leurs secrets bidonnés. Ils chuchotent dans les coins sombres et se lancent des oeillades entendues quand ils se croisent. Si aucun mouchard ne les balance, ils finissent par se trahir eux-mêmes. Sinon, comment les autres sauraient qu’ils avaient des secrets si importants à leur taire ? Sans le vouloir vraiment, nous participons à ces rites et nous en rions parfois. La semaine passée, dans le couloir du rez-de-chaussée, Bébert s’étonna à voix haute de l’embonpoint galopant d’un congénère. Avec un air entendu, Paulo lui souffla près de l’oreille : « Chut ! Ce zigue prépare une cavale à l’hélium !  » Pensif, sur un fauteuil de la bibliothèque, le petit Marseillais philosophe : « Bah ! Il faut être réaliste... Nous sommes trop fainéants ou trop conscients pour bosser à l’usine et pas assez malins pour voler sans se faire gauler, alors... » Nul besoin d’en dire davantage. Pour son espèce, aucune échappatoire, c’est la zonzon jusqu’à la retraite. Les seules personnes dites normales que nous rencontrons sont les matons. Et finalement, nous ne savons plus très bien s’ils vous ressemblent, ou si vous nous les envoyez pour vous en débarrasser. Et derrière le mur, ils constituent une armée bleue de spécimens protozoaires et de clones issus d’expériences laborantines. Ils forment le peuple des schtroumpfs. Il y a le schtroumpf brigadier, le schtroumpf du scolaire, le schtroumpf des ordinateurs... Ils ont tous une spécialité en dehors des schtroumpfs « tourne la clef » et des schtroumpfs « la matraque » que l’on reconnaît facilement à leur cagoule.

Hier, en croisant un schtroumpf plombier, Yves l’interpelle avec son accent des garrigues. La fuite du robinet lui dérange la sieste ! Aimable, le gars ouvre le placard des tuyauteries. Avec son marteau expert, il tapote à droite, à gauche. Au bout d’un quart d’heure, il balance son diagnostic : « Ah, ce n’est pas grave, c’est le joint de l’eau chaude. » Yves se réjouit : « Vous allez pouvoir me le réparer ? » « Ah non ! Moi je suis responsable de l’eau froide, il faut avertir le collègue de l’eau chaude !  » Et demain sera un autre jour... Mais à quelques détails près, identique à celui qui s’achève. Retournés en cellule, nous murmurons un vieux refrain

« Nous sommes le peuple des prisons, braves gens, braves gens
Nous aiguisons le fer des couteaux, braves gens, braves gens
Pour le beau jour où nous quitterons, braves gens, braves gens
Après vingt ans..., le pays du dedans.
 »

Article publié dans CQFD n° 42, février 2006.

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6 décembre 2007 4 06 /12 /décembre /2007 18:43
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coquelicot-et-colombe16-copie-1.jpg(collage de Joëlle Aubron)

Après plus de vingt ans d'emprisonnement
Après plus de vingt ans de lutte,
Enfin, un air de liberté.

La semi-liberté pour Jean-Marc
comme déjà  pour Nathalie
Et nous l'espérons bientôt pour Georges.

Nul doute qu'en ce jour,
comme les autres militants d'Action directe,
il peut regarder en face
ces vingt années passées
ces vingt ans de combat.

Nul doute aussi que ses pensées iront vers Joëlle
si tôt décédée
Et vers tous ceux qui, comme Georges Ibrahim Abadallah,
avec qui il a partagé tant de jours à Lannemezan
restent enfermés.

linter.


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6 décembre 2007 4 06 /12 /décembre /2007 18:40
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Des collectifs ont lutté, luttent auprès des camarades emprisonnés pour leur libération. Ici le communiqué de libérez-les!
femme_combattante-1.jpg
"La justice a enfin admis que les militants d'Action Directe sont restés droits dans leurs bottes durant ces années, et qu'après 21 ans de résistance dans les conditions particulièrement dures de l'isolement, ils n'auraient jamais renié leur engagement ni faire repentance de leurs actions armées, comme le demandaient leurs ennemis de classe."

Communiqué de libérez-les!

La Cour d'Appel du Tribunal Spécial a confirmé la décision prise par le Juge d'Application des Peines le 26 septembre dernier, Jean-Marc Rouillan sera transféré de sa prison de Lannemezan vers Marseille le lundi 17 décembre.

Il sera sous le régime de la semi-liberté conditionnelle pendant une période d'un an : c'est-à-dire qu'il travaillera aux Editions AGONE du lundi au vendredi, avec retour chaque soir à la prison ainsi que le week-end, mais il pourra toutefois bénéficier de sorties exceptionnelles à l'appréciation du JAP.

Toutes les contraintes liées à cette semi liberté sont les mêmes que pour Nathalie Ménigon, libérée le 02 août dans les mêmes conditions, mais avec obligation supplémentaire de verser 30% de ses revenus au Trésor Public (sans commentaire).

Le Comité « Libérez-les ! » se félicite de cette décision qui est un pas supplémentaire vers la liberté complète, même si nous aurions préféré qu'il soit complètement libre de ses mouvements et de sa parole.

La justice a enfin admis que les militants d'Action Directe sont restés droits dans leurs bottes durant ces années, et qu'après 21 ans de résistance dans les conditions particulièrement dures de l'isolement, ils n'auraient jamais renié leur engagement ni faire repentance de leurs actions armées, comme le demandaient leurs ennemis de classe.

Notre combat continue pour Georges Cipriani qui a déposé sa demande de libération en novembre (la justice a 6 mois pour rendre sa décision), et pour Régis Schleicher qui déposera lui aussi sa demande en février 2008. Il est établi que nos deux camarades bénéficieront des jugements de Nathalie et Jean-Marc et qu'il sera difficile de juger autrement leurs demandes de liberté (même avec des réserves).

Nos pensées vont à la camarade Commandante Joëlle, qui aurait tant aimée être là parmi nous à faire la fête, la fête de la libération, la fête de la liberté, la fête de la résistance et de la solidarité, la fête de la détermination à ne pas laisser faire.

Mme et Monsieur AUBRON, on vous embrasse très fort.

Samedi 8 décembre, nous serons à Bruxelles pour exiger la libération de Georges Ibrahim Abdallah, martyr du Peuple Ouvrier, Paysan et Prolétaire du Liban. Et nous serons aussi solidaires de nos camarades emprisonnés dans les geôles des pays impérialistes, victimes des tortures et des brimades des néo-colonialistes, martyrs des juges de classe et des régimes néo-fascisants.

Notre tâche internationaliste continue parce que nos camarades de luttes ne doivent jamais être mis dans les oubliettes de l'histoire, et que nous devons garder l'étincelle de l'espoir malgré vents et marées.

La lutte continue, la victoire ou la victoire, la solidarité est une arme !

" Libérez-les! "
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Militants d'AD

Situation des  MILITANTS

Nathalie Ménigon

Georges Cipriani

en libération conditionnelle

Jean-Marc Rouillan

en semi-liberté 

NOS COMBATS

(avril 2010)

Après la semI-liberté de Georges Cipriani, la campagne continue pour la libération de Jean-Marc Rouillan
et encore et toujours  
Pour une solidarité avec ces militants en semi-liberté, en libération conditionnelle et au-delà car le but reste le même: leur permettre de préserver leur identité politiqe et de vivre matériellement, politiquement.

(septembre 2008)

Contre le risque de peine infinie pour les prisonniers révolutionnaires - contre la rétention de sûreté - contre le CNO
Pour une libération complète et sans condition des prisonniers révolutionnaires
Pour une solidarité avec ces militants en semi-liberté, en libération conditionnelle et au-delà car le but reste le même: leur permettre de préserver leur identité politiqe et de vivre matériellement, politiquement.

  (août 2009)


Le combat pour la libération des prisonniers d'Action directe doit donc continuer et se renforcer ...
Après la réincarcération de Jean-Marc Rouillan, nous avons appris ce 20 août, le refus brutal et tellement politique de la libération conditionnelle pour Georges Cipriani.

Alerte: La santé, la vie de Jean-Marc Rouillan sont menacées, il doit être libéré.
Liberté pour Georges Cipriani'

C. GAUGER ET S. SUDER

PROCES CONTRE C. GAUGER ET S. SUDER

Pour suivre le procès : lire

 

LIBERATION DE SONJA SUDER

EMPRISONNEE DEPUIS SEPTEMBRE 2011 POUR DES FAITS REMONTANT A PLUS DE TRENTE ANS ET SUR LES SEULES ACCUSATIONS D'UN TEMOIN REPENTI HANS-JOACHIM KLEIN.

 

ARRET DES POUSUITES CONTRE CHRISTIAN GAUGER ET SONJA SUDER

ENGAGEES AU MEPRIS DE TOUTE PRESCRIPTION

SUR LES SEULES BASES DE DECLARATIONS OBTENUES SOUS LA TORTURE D'UNE PART ET D'UN REPENTI D'AUTRE PART

 

NON A LA TORTURE - NON A LA CITATION COMME TEMOIN D'HERMANN F.

Militant grièvement blessé en 1978, interrogé dès le lendemain d'une opération où il a perdu ses deux yeux et a été amputé des deux jambes, séquestré durant quatre mois sans mandat d'arrêt par la police, maintenu à l'iolement, et dont le tribunal prétend aujourd'hui utiliser les déclarations, qu'il a remis en cause dès qu'il a qu'il a pu être libéré des griffes des policiers.

 

LIBERATION DE SIBYLLE S., ARRETEE LE 9 AVRIL EN PLEIN PROCES POUR REFUS DE TEMOIGNER :

 

condamnée il y a plus de trente ans sur la base des déclarations de son ex-compagnon Hermann F., elle est restée proche de lui toutes ses années et refuse qu'on utilise ces déclarations qui lui ont été extorquées au prix de traitements inhumains.

 


Liberté pour Sibylle et Sonja 2